La pluie tombait dans le désert de Muliba, chose rare mais ça arrivait parfois, cette pluie accueillait le convois qui s'arrêta devant les portes de Barek. Les gardes semblaient tendus et c'est avec milles précautions qu'ils firent sortir le prisonnier du véhicule, celui ci regarda alors le bâtiment et dit dans un murmure masqué par la pluie :
-Barek.... si un jour on m'avait dit....
Le garde juste à coté n'entendit même pas ces quelques mots, il vit juste que le prisonnier ne semblait pas gêné par les gouttes d'eau qui tombaient dans ses yeux. Les gardes firent entrer le nouveau venu dans la prison, tout était déjà réglé, l'étage, la cellule, rien ne devait être mit au hasard pour un demi-démon, même si une solution avait été trouvée pour ses pouvoirs, les gardes se méfiaient encore, on n'est jamais assez trop prudents avec ces oiseaux là.

C'est légèrement mouillé par la pluie qu'arriva, à l'étage où il serait emprisonné, celui qu'on surnommait "Angy", personne n'avait pu lui tirer la moindre information depuis son arrestation, et ce n'est pourtant pas de faute d'avoir essayé mais il restait toujours muet aux interrogatoire, les seules choses qu'il a dit étaient sans intérêt pour son dossier. Si lui ne regardait pas les gardes qu'il croisait, eux le regardaient attentivement, ses ailes et son avant bras gauche ne passaient pas inaperçus.

"Ce n'est pas tout les jours qu'ils doivent voir des gens comme moi, pensa Angy, ça doit leur faire tout drôle..."

Comme à son habitude il ne regardait personne, pourquoi les regarderait-il? Tout ce qu'il verrait sur leur visage ne serait que méfiance et surtout l'impression d'être une sorte de bête de foire pour eux, exactement la même chose qu'il avait vu sur les visages de ceux qui l'avaient capturés, de ceux qui l'avaient jugé, il ne supportait pas ça et décida donc de ne plus regarder les gens. D'après ce qu'il avait entendu dire, il ne serait pas seul en cellule, peu importe, prisonniers comme gardes, ils étaient tous pareils, ce que lui n'était plus...
Des humains.

Le crâne appuyé contre le mûr du fond de sa cellule, Khyle écoutait la pluie, paupières closes. Ce fin clapotis régulier était la seule chose qui le liait encore au monde extérieur, monde avec lequel il était coupé depuis maintes années. Il ne saurait les compter, puisqu'en ce lieu le temps s'écoulait aussi vite que l'éternité. Le jeune homme ne pouvait voir le soleil se lever, traverser le ciel puis se coucher. Ses os, saillant de plus en plus sous sa peau, ses vêtements de plus en plus déchirés, ses cheveux de plus plus en plus longs et emmêlés... Seul son corps dépérissant comme un cadavre lui indiquait que le temps passait. À croire qu'il était déjà mort ; affirmation pas tout à fait fausse...
Le prisonnier ouvrit les yeux. Machinalement, il jeta un regard oblique à Lottie, assise à son poste. Bien qu'une éternité les séparait de la mort de Crow, l'esprit de la jeune garde semblait toujours tourmenté par son acte. Khyle sentait un pincement au cœur lorsqu'il réalisait que tout était de sa faute. Décidé à protéger Ténébris, le jeune prisonnier l'avait manipulé pour en finir avec son agresseur. Néanmoins, ce dernier ne voulait que le bien de la fille de Darkhell... Donc, en fin de compte, Khyle avait entraîné Lottie dans le monde impitoyable du crime pour rien.
Le blond cligna des yeux pour chasser cette idée. Ses doigts manipulant nerveusement sa pièce d'échec trahissaient sa culpabilité.

Je n'ai pas choisi la bonne pièce pour faire un échec et mat, on dirait. Ni le bon adversaire...

Las, il poussa un long soupir. Autour de lui, sa cellule semblait plus grande à cause de l'absence de Fireball. Khyle n'avait jamais réellement apprécié son compagnon de cellule : son immaturité et son impulsivité l'agaçaient beaucoup...Mais, à sa plus grande surprise, le prisonnier se rendait compte d'à quel point tout cela lui manquait.

D'un bruit sec, les portières menant au couloir s'ouvrirent. Un nouveau chef de garde ? Un nouveau prisonnier ? Khyle resta à sa place sans bouger d'un pouce. La réponse allait parvenir jusqu'à lui en peu de temps, de toutes façons. Et elle arriva plutôt vite ! En deux temps trois mouvements, un prisonnier fut brutalement jeté dans sa cellule. Lui qui commençait à se sentir seul...
Lorsqu'il fit face au nouveau venu, Khyle eut un mouvement de recul, pur réflexe humain devant l'inconnu. Le prisonnier s'agissait d'un jeune homme assez particulier : l'un de ses bras était recouvert d'une peau bleuâtre parsemée de marques sombres, son regard fuyant était fendu par des pupilles verticales, et pour finir, deux ailes étaient plaquées sur son dos, resserrées par des ligaments. N'importe quel être humain aurait fuit à la vue de ce "monstre", mais un criminel doit savoir lui faire face sans ciller. Après tout, le vrai monstre est celui qui habite en eux...
Ne sachant que dire pour s'introduire, Khyle employa poliment les mots classiques de bienvenue, bien que l'endroit où on l'avait accueillit n'était pas le meilleur pour bien de sentir.

- Comment te nomme-t-on, jeune homme ?

Ténébris s'était rabaissée à une simple prisonnière à attendre la fin de cette mascarade. Dans une cellule, la vie n’a plus qu’un sens : dehors.

« Mais qu’est-ce que je fais ici, bord*l ? Ah oui, c’est vrai, je suis accusée des plus grands crimes d’Alysia. »

Elle allait fermer l’œil et pouvoir profiter d’un sommeil qu’elle voudrait ne jamais finir mais non, ce n’était pas encore le moment. Ça ne l’était pas car la porte bougea dans un bruit horrible qui lui rappela la venue de la dernière personne ayant ouvert cette porte, cette horrible femme qu'était Crow. Agissant comme une primate trop longtemps restée en cage, elle bondit à l’autre bout de sa cellule et colla sa tête aux barreaux pour voir le nouveau-venu. Qu’elle ne fut sa surprise quand elle vit à quoi ressemblait ce prisonnier ! Était-ce un monstre ? Il avait un bras de couleur bleu nuancé, ses pupilles étaient verticales, comme un reptilien et ça aurait pu en être un si il n’avait pas d’ailes !

« Vu la tête de ce type, il n’a pas dû faire des crimes de novices… De quoi est-il capable ? On pourrait peut-être s’évader de ce trou grâce à lui. »

Par malheur, Darius l’avait entendu. Il tourna la tête vers lui et s’approchait de la cellule de la jeune fille en même temps que Ténébris effaçait ses rêves d’évasion.

Marcher. De long en large. Marcher encore et toujours, cherchant désespérement des réponses. De fabuleuses réponses qui n'arrivaient jamais. Marcher. Marcher encore et toujours. Sans tomber.

La magie noire de Crow avait généreusement laissé des séquelles dans la tête de Laureya. Son cerveau persistait cruellement à lui repasser les scènes du terrible combat qui avait eu lieu plusieurs semaines auparavant. Elle revoyait son propre corps attaquer Darius, son collègue. Elle se voyait quitter la Salle noire et laisser Ténébris pourrir au fond de celle-ci. Elle se voyait accepter stupidement et égoïstement de devenir le pantin d'un monstre. Les images étaient floues et parfois incompréhensibles, mes elles étaient réelles. Ses propres souvenirs ne cessaient de la tourmenter, le jour comme la nuit, au milieu de ses cauchemars.

La vie avait pourtant repris son cours habituel, ou presque, après l'incident. Deux prisonniers étaient morts, mais peu pleuraient leur perte. Les cellules presque vides de Barek lui facilitaient la tâche, surtout que la jeune garde devait constamment se battre contre sa propre mémoire. Personne ne semblait se rendre compte à quel point l'âme qui habitait son corps était ravagée.
La pauvre femme ne dormait plus, et cela paraissait tranquillement mais surement sur son visage enfantin. Son esprit était brouillé et elle perdait parfois la mémoire ou le cours des choses. Le regard dévastateur de Shaco, même s'il s'était révélé être une autre personne, continuait de la suivre comme une ombre malveillante. Son coeur de femme n'arrivait plus à supporter la trahison qu'elle avait commise, même si personne n'avait reparlé de cet incident. Laureya aurait probablement été enfermée à un autre étage de Barek, celui des fous, si les gens avaient découvert à quel  point son esprit était tourmenté et ravagé. Elle se referma donc sur elle même, et continua machinalement de marcher devant la cellule de son unique prisonnier, chaque jour de sa misérable vie, évitant les contacts humains du mieux qu'elle le pouvait.
Pourtant, les dommages n'étaient pas seulement psychologiques. Le mot qui avait été gravé sur son front avait presque disparu, il ne lui restait plus qu'une cicatrice douloureuse au dessus du sourcil gauche. Par contre, la jeune garde éprouvait de plus en plus de difficulté à contrôler son propre corps, comme si la magie ne l'avait pas tout à fait relâché. Son bras droit continuait de lui donner de la misère, et elle était convaincue que sa technique de combat en était gravement atteinte.   L'un de ses yeux n'avait pas repris sa couleur normale, ce qui avait pour conséquence de la faire paraître encore plus cinglée. Laureya s'entêtait à éviter de regarder les gens encore plus depuis qu'elle l'avait découvert.
La vie n'avait pas beaucoup changé à Barek, mais les gens, si. Lottie portait toujours ce regard légèrement coupable d'avoir tué Crow, même si personne ne lui en voulait, comprenant qu'elle les avait tous sauvé. Khyle semblait se noyer dans ses remords. Ténébris avait de plus en plus l'air de vouloir quitter ses murs. Et Laureya n'était plus qu'un mélange de mauvais goût entre la jeune femme qu'elle avait été et le pantin que "Shaco" avait créé.

La garde marchait machinalement lorsque le bruit de la porte lui fit relever la tête. Ses longs cheveux blonds tombaient dans ses yeux, et elle dût les écarter pour voir le nouveau malheureux qui entrait dans cet étage, où les problèmes ne faisaient que se multiplier. L'apparence de cette chose lui parût repoussante, quoi qu'elle s'avoua adorer les ailes qui ornaient le corps étrange. En regardant plus attentivement, elle arriva même à lui trouver un certain charme. Qu'est-ce que ça pouvait bien être? Refusant de croiser qui que ce soit, Laureya resta dans son coin, mais se promis de faire des recherches plus tard.
Elle se remis donc à marcher, faisant les cents pas devant la cellule du pauvre Malco, qui devait en avoir franchement assez de la voir user le plancher de cette manière.

Dans la pénombre, non loin derrière la créature que tout le monde passait son temps à dévisager, se cachait une grande masse imposante. Rien ni personne n'avait remarqué son pas lourd et plus ou moins lent, sa démarche quelque peu hésitante.. Cette grande ombre avançait sans même prêter attention à tout ce qui se passait autour d'elle, elle ne faisait qu'avancer... Au bout d'un certain temps, elle était discernable, on pouvait reconnaître un homme sous cette grande cape marron totalement trempée. Le temps ne l'avait pas épargné, il dégoulinait, il tremblait, surement à cause du froid qu'il faisait en Barek. Dans tout ce silence seulement les bruits de ses pas et de son souffle se faisaient entendre, l'atmosphère était pesante. Le colosse ne percevait que de la haine, du dégoût, de la tristesse et miraculeusement de la fascination...

Après un certain temps, l'homme qui était resté invisible aux yeux de tous s’arrêta en plein milieu du long couloir silencieux. Il regardait tranquillement autour de lui comme un enfant perdu. Il ne l'était pas non, c'était seulement sa façon d'analyser et de juger tout ce qui l'entourait, ce qui lui prit étonnement peu de temps.
Effectivement, il ne mit pas longtemps à comprendre que tout le monde était touché par les événements récents dont on lui avait fait part. L'homme avait également comprit que, pour le moment, aucun ordre n'avait été établit et surtout qu'il n'y avait personne pour diriger tout cet étage.

Le colosse ne tarda pas, par la suite, à se diriger vers Lottie, qui lui paraissait pour le moment la plus lucide même si ça ne devait pas en être vraiment le cas.

« On dirait que vous ne vous êtes toujours pas remit des événements passés ici, à Barek... L'homme laissa couler un peu le silence et reprit. Oh excusez mon impolitesse, j'ai oublié de me présenter. Je me nomme Edgard, je suis le nouveau garde.. Soyez rassurée, j'ai été mis au courant de tout le foutoir qu'il y a pu avoir à cet étage !... A ce que j'ai pu analyser, vous n'avez toujours personne pour diriger l'étage, alors à qui dois-je m'adresser ? »

Edgard regardait la jeune femme avec un grand sourire et décida de la laisser s'exprimer.

Le contact avec le sol froid de la cellule n'avait pas été des plus agréables, il eu à peine le temps de voir son colocataire qui eu une réaction tout à fait normale face à son arrivée "délicate" et son apparence. Angy se releva en maudissant les gardes qui l'avaient jeté comme un sac de nourriture quand son compagnon lui demanda :
- Comment te nomme-t-on, jeune homme ?
- .... Vu que je n'ai pas de nom, on me surnomme Angy. Il laissa un temps de silence, se demandant si il devait continuer de parler ou non puis finalement demanda ... Et toi?

Sans attendre de réponse il regarda autour de lui puis se dirigea vers la porte histoire de voir à qui il aurait à faire à cet étage, il aperçut des visages vite fait au cellules mais son regard fut plus attiré par la garde qui faisait des va et viens incessants, il sentait en elle un mal être mais il n'arrivait pas à distinguer son visage, elle semblait s'arranger pour camoufler aussi quelque chose de physique, elle lui faisait penser à son propre comportement et il aurait aimé voir ses yeux pour y lire dedans mais pour cela il devrait la laisser regarder les siens... cela en valait-il la peine?

Il jaugea aussi les autres gardes, une ambiance assez lourde plane sur eux et pensa "Il est clair qu'il s'est passé quelque chose ici récemment." Il entendit alors le garde qui était arrivé avec lui, ce colosse auquel il avait piqué la vedette on peut dire :
On dirait que vous ne vous êtes toujours pas remit des événements passés ici, à Barek...
"Il s'est donc bien passé quelque chose ici"
Oh excusez mon impolitesse, j'ai oublié de me présenter. Je me nomme Edgard, je suis le nouveau garde.. Soyez rassurez, j'ai été mit au courant de tout le foutoir qu'il y ait put avoir à cette étage !... A se que j'ai put analyser, vous n'avez toujours personne pour diriger l'étage, alors à qui dois je m'adresser ?
"Pas de chef des gardes, c'est récent à ce point?"

Il délaissa la porte pour aller dans un coin de la cellule pour s'y asseoir et réfléchir, et c'est lorsqu'il voulu s'appuyer sur le mur que ses ailes entravées se mirent à le déranger :
-Ah quelle plaie!!! Depuis que je les ai, ces fichues ailes peuvent parfois me déranger mais là c'est... Il s'interrompit, il espérait que son colocataire n'avait pas fait gaffe à ses dires mais ça l'étonnerait, en essayant de désentraver ses ailes sans succès il repris assez géné, Voudrais-tu bien m'aider?

"Quel idiot je fais moi, personne ne doit savoir....

- Surnom plutôt aimable. Surtout pour un hôte de cette prison à miracles.
-... Et toi?
L'étrange créature répondant au charmant surnom "Angy", n'attendit pas sa réponse. Il se tourna directement vers les barreaux, balayant le couloir de ses yeux gris. Khyle put enfin voir attentivement ses fameuses ailes, solidement attachées par de résistants ligaments. Il plissa les yeux à la vue de ces plumes obscures recouvrant sa troisième paire de membres.
« Angy... Subtile déformation du mot "Ange", où dirais-je plutôt... "Ange Déchu" » Se dit-il, en contenant son rire.
Mais il reprit vite son sérieux quand son esprit se rappela du terme "Ange Déchu". Les anges... d'après les croyances d'une grande partie du peuple Alysien, ces créatures sont l'incarnation du bonheur, de la courtoisie, de la gentillesse, de la patience, de la sérénité... Bref, ils sont dotés de toutes les qualitées existantes en ce monde. Envoyées par les dieux avant qu'ils n'abandonnent Alysia, les anges ont pour mission de veiller sur les êtres peuplant le monde, et faire en sorte que leurs vertus soient permanentes. Néanmoins le bien ne peut exister sans le mal. De tous les anges qui ont été créés, il était impossible que la nature ne permette pas une erreur. Portant sans cesse le nom d'Anathos aux lèvres, des anges imparfaits sont nés pour mener à bien l'équilibre. Des anges ratés, défectueux, imparfaits...des anges déchus portant sur le dos de lugubres ailes noires. Malfaisants et révoltés, ils faisaient le contraire de leur frères vertueux, envieux de leur perfection qu'ils n'ont pas pu atteindre. Ces anges aux ailes noires firent naitre dans le coeur de tout être les pires pêchés existants... De certains, ils en firent des criminels assoiffés de sang, disposés à tuer sans regret chacunes des oeuvres de leurs frères.
Donc, en emprisonnant Angy, avaient-ils capturé un vrai ange déchu ? Avaient-t-ils capturé l'un des coupables du mal existant sur Alysia ? Le responsable des crimes de tous ceux qui se trouvent à Barek ?
Le premier qui posera une question pareille perdra illico le respect de Khyle !
Dans sa philosophie, la seule et la vraie pour lui, le mal existe déjà au plus profond des âmes. Ce sont certaines circonstances qui lui permettent de se libérer.
« Si un vrai Ange Déchu m'avait entrainé vers le mal, je l'aurais bien vu passer sous mes yeux. »  Plaisantait-il à chaque fois.
Mais le désespoir pousse souvent les mortels à se tourner vers les croyances, afin qu'elles leur apportent réconfort et explications à tous les maux qui s'abattent sur eux. Khyle ne saurait combien de fois, depuis sa plus tendre enfance, il avait entendu ses parents couiner "L'armée est possédée par des anges déchus !" Dans le manoir Royblant, seul lui, Horyal et Mélie avaient compris que ce n'était pas les dieux, ni les anges, qui allaient les sauver. Les autres passaient presque toute la journée, les yeux mouillés de larmes, agenouillés devant des statues, à implorer leur miséricorde.

- Khyle est mon prénom... Répondit enfin le prisonnier, dans un soupir. Mon nom... je l'ai perdu moi aussi...

Ah ! Un garde était entré au même temps qu'Angy... Il était si dénué d'intérêt que Khyle avait complètement oublié sa présence avant qu'il ne s'adresse à Lottie. Sa taille colossale dépassait de loin celle de la jeune garde. Cet Edgard avait le visage dévoré par une barbe hirsute, mais ses yeux étaient étrangement niais... Etait-il l'un de ces gardes qui traitent les prisonnier comme leurs égaux ? Il serait fâcheux de tirer des conclusions trop hâtives... Mieux valait observer et tester cet homme. Si l'on veut tirer une conclusion, il est préférable de réaliser l'expérience avant, non ?

-Ah quelle plaie !!!
Khyle sursauta. Par dessus son épaule il épia Angy qui s'était assoupi au fond de la cellule. Après sa plainte, il se mit à marmoner des mots presque inaudibles, mais il s'intérompu assez vite. Essayant sans succès de libérer ses ailes, son nouveau compagnon de cellule lui demanda de l'aide. Un léger sourire sur ses lèvres, Khyle rejoint l'étrange créature dans le coin de la pièce, afin que les gardes ne puissent entendre ses dires.

- Regarde-moi, je ne suis que peau et squelette... Si tu n'as pas la force pour te libérer de tes liens, en quoi la mienne serait utile ?
Il marqua une pause avant de continuer, d'une voix plus grave.
- Dis-moi, que ferais-tu une fois ta troisième paire de membres libérée ? Les utiliserais-tu pour t'échapper à tire d'ailes de cette merveilleuse prison ? Bien que ce serait difficile pour toi, ce serait vraiment dommage que tu nous quittes si tôt. Tu aurais abandonner la seule chance de t'exorciser de tes crimes...
Une pointe d'ironie dans la voix, il ajouta doucement :
- N'est-ce pas, Ange Déchu ?

546 ...

547 …

Malco regardait Laureya faire des allers retours depuis près d’une heure et il commençait à en avoir marre de ce cirque.

548 …

Il était hypnotisé par cette routine qu’offrait sa garde. À tel point qu’il ne s’est pas attardé sur la venue du nouveau prisonnier. Ni du nouveau garde d’ailleurs.

549 …

Une question le tourmentait : Pourquoi sa garde cachait elles ses yeux ? Elle ne voulait pas qu’on croise son regard ? C’était peut-être la faille qu’il lui permettrait de sortir de ce trou.

550 …

Non. Ce n’était pas encore l’heure pour tenter une évasion. Il lui fallait un bon plan. Il lui fallait de l’aide …

551 …

Mais avant, il devait le trouver. Oui. Le trouver et le tuer. Tuer encore et toujours. La mort semblait être la meilleure solution. La solution la plus simple. Tuer sans hésitation. Ce n’était pas la première fois. Cependant …

552 …

Il n’aimait pas tuer. En tant que voleur, il savait une chose essentielle : En cas de danger, il devait tout faire pour s’échapper. Pour rester libre. Et pour ça il devait choisir la solution la plus simple et la plus efficace ! Il a tué et il tuera encore s’il était dans l’obligation de le faire. Sans aucune hésitation. Aucune … mais avec des remords.

553 …

Énormément de remords. Hanté à chaque nuit. Non pas par le visage de ses victimes, car il ne prenait pas le temps de les regarder. Hanté par le nombre de ses victimes. 178. Tous innocents.

554 …

Les pires criminelles d’Alysia l’entourent. Tous des tueurs. Des fous. Certes, il n’aimait pas tuer et contrairement aux autres prisonniers il n’y ressentait aucun plaisir. Pourtant, il en a tué plus que quiconque.

555.


Malco se leva d’un bond furieux. Se dirigea vers sa garde avec l’envie de la frapper. De la secouer. De lui hurler : « Quand vas-tu enfin arrêter ce cinéma ? Je comprends que tu puisses te sentir coupable par rapport aux gardes puisque tu n’étais plus la même lors des derniers événements ! Pourquoi tu te sens coupable ? Ce n’était pas toi ! Alors arrête de faire ces p*t**** d’allers retours et va voir Darius et Lottie pour en parler. Et profites-en pour dire à Darius que tu l’aimes, parce que tout le monde a remarqué qu’il se passe quelque chose entre vous sauf vous ! Namého. »

Malco retourna tranquillement à sa place. Il aurait aimé dire tout ça à Laureya au lieu de rester figé comme un idiot. Pourtant, il ne l’a pas fait parce qu’au fond il n’avait pas l’envie de se mêler des affaires des autres. Lunaya aurait-elle réagit si elle était toujours vivante ? Malco s’empara d’une boite qui appartenait surement à la jeune elfe et qu’il avait trouvé par hasard il y a de cela 3 ou 4 jours. Il examina l’objet une énième fois et l’ouvrit pour jeter un coup d’œil aux trésors qu’il contenait. Il n’y avait rien de spéciale dans le coffret, mais ça lui permettait de s’évader un peu de cette misère et d’oublier la grotesque chorégraphie qu’interprète Laureya sans cesse.                                                                            
Une pensée lui traversa l’esprit.

« Lunaya … tout comme moi aujourd’hui, est-ce que contempler ce que contient cette boite te permettait d’imaginer une autre réalité ? Une liberté ? »

De cette simple pensée, s’est succédé une panoplie d’autres pensées beaucoup plus obscures. Il referma la boite et la dissimula aux yeux des gardes.

« Liberté que tu n’auras finalement jamais pu retrouver. Et tout cela à cause de lui …»

Malco savait désormais deux choses.
Il tuera l'empoisonneur. Il vengera Lunaya. Par sa main s'abbatera la colère de Lunaya.
Il prendera pour la première fois le temps de regarder le visage de sa victime.

Et il ne ressentira aucun remord.

- Khyle est mon prénom... Mon nom... je l'ai perdu moi aussi...
Les mots de Khyle résonnaient encore dans l'esprit d'Angy quand il essayait vainement de se détacher les ailes, si Angy se bornait à dire qu'il n'avait plus d'identité, son "colocataire" lui avait toujours son prénom auquel se rattacher, ce qui n'était pas son cas, il ne pouvait plus se rattacher à rien, plus rien de son passé car il avait décidé que ce passé serait mort.

Quand il demanda à Kyle un peu d'aide pour se délier les ailes, celui-ci s'approcha et lui dit :
- Regarde-moi, je ne suis que peau et squelette... Si tu n'as pas la force pour te libérer de tes liens, en quoi la mienne serait utile ? il marqua une petite pause, dis-moi, que ferais-tu une fois ta troisième paire de membres libérée ? Les utiliserais-tu pour t'échapper à tire d'ailes de cette merveilleuse prison ? Bien que ce serait difficile pour toi, ce serait vraiment dommage que tu nous quittes si tôt. Tu aurais abandonner la seule chance de t'exorciser de tes crimes...
Il alla répondre quand Khyle ajouta :
- N'est-ce pas, Ange Déchu ?

Angy regarda très étonné le jeune homme, sur le coup il en avait rien à faire de voir les yeux de quelqu'un d'autre, ce type était très intelligent et Angy devait se méfier de tout ce qu'il pourrait dire, ce gars là pourrait finir par comprendre des choses qu'il veut absolument cacher.
- Je ne pense pas être ce que tu dis, mais si tu veux le croire, libre à toi. Pour ce qui est de ta force, arrange toi pour que j'puisse attraper ses fichus liens, je n'ai pas la souplesse pour les attraper, ils les ont bien placé ces... Il se calma pour éviter de dires des vulgarités puis repris, et ne t'en fais pas, je ne compte nullement partir d'ici en volant, les couloirs de la prison ne sont pas une bonne volière et puis j'imagine qu'ils ont pris quelques précautions à ce sujet. Quand à mes crimes......

Ses crimes, Angy y pensait sans cesse, comment avait il pu tuer autant de gens si facilement? Il se le demandait encore, cette force qu'il utilisait pour tuer était à la fois grisante et terrifiante, il avait tellement de force qu'il se demandait comment il en était arrivé là, toute cette douleur qu'il avait reçu avant de devenir si puissant, cette douleur que cette puissance lui provoquait, aurait-il pu continuer longtemps à détruire de cette façon, que se serait il passé si il n'avait pas été capturé? Une chose est sûre, en prison il serait, d'une certaine façon, tranquille, assez tranquille pour réfléchir :
"Je suis loin de tout ça, très loin, et tant pis si les gens pensent que je suis un ange déchu, jamais ils ne feront de moi ce que je nuis pas"

Finalement il réussit à attraper les liens et tenta de les détacher puis le regard perdu dans le vide il continua d'une voix qui semblait dénué de sentiments sa phrase qu'il avait laissé en suspens :
- Mes crimes jamais je les exorciserais, ils resteront toujours gravé en moi, comme les tiens ou ceux de n'importe quel prisonnier ici, nous somme ici pour ne plus être un danger, mais ça tu le sais déjà alors qu'on ne me parle pas d’expiation ou de ce genre de trucs, mes crimes sont en moi tout comme ils sont en ceux qui ont survécus ou comme ils sont en les proches de ceux que j'ai tués. C'est comme ça... qu'importe ce qu'il adviendra de ceux qui ont commit des crimes, les choses ne changeront pas, même si il n'y a longtemps je ne pensais pas comme ça.

Il réussit enfin à dégager ses ailes et jeta les liens vers la porte :
- Enfin je vais pouvoir appuyer mon dos sur le mur et laisser libre cours à mes pensées, j'ai besoin de me reposer, dit il en se s'installant dans un coin sombre de la cellule et fermant les yeux pour profiter d'un instant de tranquilité.